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dimanche 21 février 2016

FRANCKY, TU ES PARTI SANS QU´ON NE SE SOIT REVU TEL QU´ENTENDU!

     Il fut un ami et notre amitié s´est construite d´abord à l´École Normale Supérieure (ENS) de l´Université d´État d´Haiti (UEH) pour ensuite se renforcer et se consolider à l´Université d´État de Campinas (Unicamp) au Brésil. Un grand ami avec qui les discussions intellectuelles, très fructueuses, se déroulaient dans un atmosphère de respect et d´humour en faisant valoir la divergence des opinions. Tout ce qu´on peut espérer de la compagnie d´un camarade dans une ambiance académique et universitaire, c´est sa capacité à susciter l´approfondissement des débats à travers ses interventions, à trouver en lui des sources d´inspiration pour aller plus loin, à accepter la contradiction des idées afin que la lumière jaillisse, enfin, à mûrir avec lui des rêves de changement d´une société. Tels furent quelques des grands caractères de Francky Altineus dont le départ, survenu dans des circonstances regrettables et lamentables, m´a plongé dans une profonde tristesse vu que je pratiquais le personnage depuis exactement 9 ans.

     Nous avons, en effet, développé une amitié si franche et intime au département des Sciences Sociales de l´ENS, où nous avons été admis en 2007, que tu m´appelais ''Maître Faboulo'', parce que tu savais que j´étudiais parallèlement le Droit à la Faculté de Droit et des Sciences Économiques de l´UEH. C´était juste pour me taquiner et on se sentait bien de la sorte, on s´en amusait, on s´en riait. Cela, devenu une sorte d´habitude affectionnelle et en ayant traversé les frontières haitiennes, s´est poursuivi jusqu´au Brésil où, sous le croisement de nos derniers regards en 2014, tu devais me laisser pour retourner en Haiti. Séparé physiquement de toi, un de mes meilleurs amis, je m´en sortais très difficilement. Dans la soirée du 8 août 2011 - date à laquelle correspond l´entrée légale et officielle sur le territoire brésilien d´un groupe d´environ quatre vingt étudiants haitiens - du nombre desquels nous nous figurions - bénéficiaires des bourses d´études octroyées par le gouvernement brésilien dans le cadre du programme Pró-Haiti financé par la CAPES (Coordination pour l´Approfondissement et le Perfectionnement des Études Supérieures) -, dans cette chambre très exigue de 6 personnes où toi et moi partageâmes un petit espace très coincé, nous avons fait le serment, y compris les 4 autres camarades, de revenir en Haiti dès que valablement formés, pour y servir et y être totalement impliqués dans sa marche vers le développement, te le rappelles-tu? Te souviens-tu m´avoir dit, après ta maîtrise, à la défense de laquelle j´ai été malheureusement empêché de prendre part, que ton plan était de retourner au Brésil pour y poursuivre tes études doctorales? Tu te rappelles qu´on s´était entendus de se rencontrer en Haiti lorsque j´y rentrerai? Tu te rappelles qu´il fallait se revoir immédiatement dès j´aurai mis les pieds sur la terre d´Haiti pour travailler ensemble sur ton projet doctoral? 
     He! bien je suis désolé, mon grand ami, de ce que cette rencontre ne pourra plus jamais avoir lieu, car tu es parti sans me prévenir. Si c´est Dieu, maître de vie et de mort, qui en a décidé autrement, alors je n´y peux rien. Pardonne-moi mon ami, car cela dépasse non seulement ma capacité, mais encore mon pouvoir! Je te prie de recevoir toutes mes excuses! Oui, tu t´en es allé sans qu´on ne puisse se revoir tel qu´entendu pour discuter ensemble de notre projet de construire une école. 

     Certes, aucun misérable être humain ne peut décider de la manière dont il doit mourir. Il est toutefois cruel et dur d´admettre que cela soit arrivé par des actes de barbarie et d´irrespect à la vie qui nous enlèvent des êtres chers et nous privent de leurs affections. Peut-être mon sort sera-t-il pir que le sien, mon ami, mais, cela m´importe très peu! Pendant que je suis encore en vie, je ne peux laisser inexprimé ce regret de n´avoir pas pu te convaincre sur le fait qu´Haiti est une mère qui mange et n´arrête pas de manger ses propres fils et filles, le jour où nous fûmes entrain de débattre ce sujet sur le campus de l´Unicamp. Néanmoins, tu avais tellement de nostalgie de revenir sur ta terre natale pour y aider - un mal du pays, dirait Maurice Syxto -, tu étais tellement animé d´une soif démesurée de revenir partager avec tes compatriotes le peu de savoirs acquis à l´Unicamp, plus particulièrement, à l´Institut de Géosciences où tu as décroché ton diplôme de maîtrise en Géographie de l´environnement entre 2012 et 2014, que rien ne pouvait te retenir au Brésil. De fait, tu es revenu dans ton pays tout enthousiasmé, tout frais et super motivé pour servir. Mais, malheureusement, ce rêve que tu caressais si joyeusement dans ton coeur, que tu me partageais infatigablement dans des échanges, celui d´être un grand Géographe à l´image de George Anglade (Géographe haitien) et de Milton Santos (Géographe brésilien) tes préférés, tu ne pourras plus jamais le réaliser. Car, tu étais persuadé et convaincu que c´est en travaillant dans ton pays, en partageant les connaissances avec tes frères que tu pourras atteindre ce but. Mais hélas! Tous ces efforts n´ont eu pour récompense que ta mort tragique.

     Je ne sais pas où tu es maintenant et je n´ai pas non plus envie de le savoir, mais, qu´importe l´endroit où se trouvent actuellement ton âme et ton esprit (dans le pays ou le monde des âmes et des esprits), saches que je pleure amèrement ton départ autant que je me lamente sur cette pratique voire cette culture d´impunité et d´injustice qui s´érigent en norme dans cette Haiti que nous chérissons tous malgré tout. L´impunité et l´injustice t´obstrueront le chemin de la justice et de la paix mon ami. Aussi te troubleront-elles le sommeil. La justice est la seule et unique chose qui puisse minimalement consoler ta famille, tes proches et tes amis, moi en particulier. Elles, l´impunité et l´injustice, nous agressent, nous maltraitent, nous démoralisent, nous attristent, nous déconcertent, nous affaiblissent, nous démotivent, nous animalisent plus que tout autre acte en soi, qu´importe sa nature. Elles brisent nos rêves et détruisent nos projets. Elles transforment les agresseurs en victimes, les victimes en agresseurs. C´est tout un monde à l´envers qu´elles bâtissent autour d´elles mon ami. Enfin, l´injustice et l´impunité cultivent en nous, victimes, la peur de nos bourreaux devenus seigneurs, un sentiment de honte et de culpabilité et nous rendent étrangers dans notre propre pays natal. 

     Néanmoins, comme le veut la formule de politesse, le voeu pieux, bien que je doute fort de sa matérialisation tant à moyen qu´à long terme, ce serait de voir qu´une différence soit faite dans ton cas, mon cher ami. Autrement dit, que la justice soit rendue en signe de respect pour ton âme et celle des autres qui ont péri avec toi dans cette malencontreuse journée à l´Arcahaie. Ce sera, en dépit de tout, un soulagement pour ta famille, tes amis et tes proches afin d´amoindrir en eux les impacts psychologiques et mentaux inefaçables laissés par ce départ si prématuré. En effet, une fois de plus, les efforts et les sacrifices pour se construire d´un jeune cadre intellectuel en herbe de la société haitienne viennent d´être gaspillés. C´est le rêve de toute une famille de voir son fils briller après de nombreuses tribulations consenties au quotidien qui vient de se briser, c´est l´espoir de toute une société juvénile en quête de formation de compétence qui vient d´être interrompu, enfin,  c´est tout un petit arbre en phase de germination qui vient d´être prématurément abattu. Tu as donc râté ton sublime rêve d´être un grand géographe pour ta famille, ta communauté et ta société mon ami! Une gloire manquée que ta famille aura constamment du mal à digérer. Que c´est frustrant, révoltant et désolant!

     Enfin, s´il advient que je dois partir de la même façon que toi, mon ami, qu´il en soit ainsi! Alors, nous aurons certainement beaucoup de choses en commun à nous raconter tous les deux et là tu pourras me dire clairement toute la vérité sur ce qui s´est réellement produit ce dimanche 7 février 2016 à l´Arcahaie, car toi seul et toi seulement sais véridiquement ce qui t´est arrivé là-bas. Je te pleure moins quand il me vient à l´esprit quelques paroles spirituellement fortifiantes et réconfortantes d´Ecclésiaste selon lequel la mort nous libère des vissicitudes de la vie, les morts sont plus heureux que les vivants parce que désormais les affres de la vie cessent de les atteindre et de les tourmenter. C´est une vérité difficile à accepter. En outre, quand je sais que c´est une traversée que tu viens d´effectuer - bientôt je t´y rejoindrai -, que, finalement, dans cette traversée il n´y a ni devant ni derrière, ni premier ni dernier, ni supérieur ni inférieur, ni maître ni esclave, alors c´est ce qui me donne la force et l´énergie de rester encore débout, car tellement abattu par ton assassinat qui me laisse un choc psychologique et mental irremédiable. Dans ce tourbillon de traversée, les vivants et les morts ne forment qu´une seule et même entité. L´homme vit autant qu´il meurt et meurt autant qu´il vit! Seuls les vivants parlent de la mort et ils peuvent en parler pour la simple et bonne raison qu´ils sont vivants, donc la mort c´est encore la vie sous une autre forme qui dépasse non seulement la dimension de ce monde physique qui nous entoure, mais surtout notre entendement, nous autres êtres humains. Sur ce, vis dans mon coeur et dans mon esprit, mon ami, car, à la vie comme à la mort, notre amitié demeure éternelle, fidèle et sincère.

Pour saluer, dans un esprit d´amitié éternelle, le départ de Francky Altineus à la famille duquel j´adresse toutes mes sincères condoléances!


Jean FABIEN

Campinas, dimanche 21 février 2016


lundi 8 février 2016

7 FÉVRIER 2016, HAITI TOURNE LA PAGE DOULOUREUSE DE CE MARTELLY, MAIS...

     Le 7 février 2016, Haiti vient de se décharger d´un fardeau qu´elle a été astreinte de porter pendant cinq ans. Ce furent, en effet, cinq années d´insultes, de hontes, d´injures, de propos salissants, avilissants que nos enfants, nos jeunes n´auraient jamais dû entendre sortir de la bouche de celui qui était censé être le premier d´entre nous malgré tout. Hélas! Pauvre Haiti! Heureusement, nous avons Ecclésiaste pour nous remonter le moral et nous donner la force de continuer à vivre et d´espérer dans un lendemain meilleur quand il dit: ''il y a un temps pour chaque chose''. Si l´ère martellyste fut le temps allarmant où il trainait dans la boue le peu qui nous restait comme valeur morale, symbolique et culturelle, ce 8 février 2016 est le temps d´essuyer ces larmes et de prendre la ferme décision que nous ne revivrerons plus jamais ce temps sous quelle que forme que ce soit. C´est une révolution froide et douce qui vient de se produire en Haiti. Cependant, la messe n´est pas encore dite. L´épée de Damoclès est encore pandue plus gravement sur la tête du pays.

     La cérémonie traditionnelle de passation de pouvoir n´a pas eu lieu, en lieu et place une séance spéciale s´est tenue au Parlement réuni en Assemblée Nationale le dimanche 7 février 2016 pour recevoir l´acte officiel de la fin du mandat de M. Martelly et constater en même temps l´existence d´un vide présidentiel. Cette situation politique extrêmement spéciale s´explique par quelques scénarios importants. En premier lieu, le président sortant, M. Michel Martelly, arrive au terme de son mandat sans pouvoir, cependant, passer l´échappe présidentielle à son successeur conformément aux voeux constitutionnels. Il l´a, par conséquent, remise là où elle lui a été passée au cou le 14 mai 2011, c´est-à-dire au Parlement. Le second scénario s´explique par le fait que l´Éxecutif, comme le Parlement entre 2014 et 2015, devient automatiquement en cette date disfonctionnel. Haiti est réellement une terre d´exceptionalités, de spécialités, de stupéfactions, d´inventions, mais surtout l´endroit qui rend le possible impossible, l´impossible possible. 

     Il y a, par ailleurs, un autre constat à faire, il s´agit du climat socio-politique dans lequel cette fin de mandat s´est déroulée. En effet, le peuple haitien a grandi et fait preuve d´une certaine maturité démocratique en laissant M. Martelly partir dans une certaine tranquilité sans qu´il n´y ait d´invasion militaire (comme en 1994 et en 2004), des violences populaires, des déchoucages, des chasses à l´homme (comme le 7 février 1986), sans qu´il n´ait été contraint à l´exile. De plus, après son passage au Parlement, il a emprunté les rues de Pétion-Ville à pied sans incidents majeurs. Cette attitude est à remarquer. Pour une seconde fois depuis 1986, un président laisse le pouvoir et reste dans le pays. Cela est encore historique et s´inscrit dans les grandes pratiques modernes de la démocratie. Bravo au peuple haitien! Il a renvoyé le signal qu´il est un peuple pacifique. Sur ce, il est important d´aller sur cette même voie et d´en faire plus en vue d´éviter toute entrave à la croissance de notre démocratie en perpétuelle construction. Néanmoins, tout ce qui est à retenir de cette journée, c´est qu´Haiti vient de tourner une page de son histoire, la plus malheureuse pour ne pas dire la plus cauchemardesque. Le temps où le peuple se faisait insulter à longueur de journée, à chaque sortie spectaculaire est désormais révolu. Le temps du rève dans lequel était plongé un grand nombre d´Haitiens tant en Haiti qu´à l´étranger est passé, voici il nous est offert l´opportunité de commencer une nouvelle Haiti.

     Cependant, je doute fort que la façon dont cette journée s´est achevée au Parlement permette d´entrevoir une solution rationnelle. La formule de sortie de crise consentie à l´aube du 7 février et parafée par les présidents des deux chambres et celui de la république entre ce dernier et l´Exécutif est problématique à cause de la configuration actuelle du parlement et du climat d´incertitude qui plane sur sa légitimité à être acteur d´un tel concensus. Je crains que celle-ci puisse permettre effectivement de trouver une porte de sortie à la situation socio-politique actuelle, ce pour plusieurs raisons. Comme l´ont admis plus d´un, la crise dépasse le cadre institutionnel, disons mieux, elle n´est pas entièrement ou seulement institutionnelle, elle est aussi conjoncturelle et nécessite de s´ouvrir aux autres acteurs sociaux, politiques et économiques, donc le plan de sortie de crise ne peut être unilatéral surtout avec un Parlement qui n´inspire pas confiance, mas il mérite d´être multilatéral. 

     Cette soi-disant 50ème Législature rentrée en fonction à l´insu des procédures prévues à cet effet est entachée de contestation et d´illégitimité parce qu´il est issu des démagogies produites par le CEP les 9 août et 25 octobre 2015 communément appelés très malsainement ''élections''. Par conséquent, il ne serait pas en mesure de décider à elle seule une formule en laissant de côté l´opposition, les partis politiques et les organisations de la société civile, surtout que beaucoup d´entre ces parlementaires font l´objet de virulentes suspicions. Nous sommes ici face à une incohérence grave. Car, si, d´une part, les ''élections'' législatives et présidentielles des 9 août et 25 octobre 2015 ont été genantes et vivement contestées à tous les niveaux au point que Jude Célestin a définitivement décidé de ne plus embrasser un second tour du scrutin pas avant une évaluation complète du processus par une commission digne à cause des fraudes et irrégularités, alors de quel droit ces parlementaires issus de celles-ci peuvent-ils se prévaloir des prérrogatives d´apporter une quelconque solution à la crise engendrée elle-même par ces diverses contestations? C´est d´elle qu´est accouché aujourd´hui ce vide présidentiel, alors comment ceux qui en sont le produit peuvent-ils être problème et solution à la fois? Autrement, nous sommes en droit de nous demander si ce parlement existe-t-il réellement? Si oui, peut-il faire partie de la solution de la crise?

     Toutefois, il convient d´admettre qu´en dépit de tout, cette décision issue du parlement, le dimanche 7 février 2016 selon laquelle l´ex-président Michel Martelly a remis le pouvoir à l´Assemblée Nationale, a évité le pir attendu, par contre, le malheur plane encore sur nous. Mais, que dit l´entente? Qu´est-ce qu´on peut attendre d´elle? En effet, selon l´entente trouvée pour assurer un départ ''controlé et réfléchi'' de Martelly dans le calme et la paix - ce qui a été constaté d´ailleurs - il est entendu que, une fois le vide présidentiel est constaté par le président de l´Assemblée Nationale, la présidence est vacante et, afin de remplir ce vide provisoirement, il est prévu deux choses: premièrement l´ouverture des inscriptions à tous les citoyens et citoyennes à l´échelle nationale répondant aux exigences faites par la constitution et les lois de la république, afin de venir faire le dépot de leurs pièces au parlement, deuxièmement la création d´une commission parlementaire bicamérale qui sera chargée de l´étude de ces dossiers. Quelle foutaise!

     Plaidant en faveur du respect des institutions et de leur valorisation, je trouverais cette formule superbement correcte dans le cas où l´institution en question n´était pas sous les coups des suspicions, c´est-à-dire si les membres qui la composent n´étaient pas issus d´un processus électoral vicié à la base, s´il y avait des dispositions légales qui l´ont prévue. Donc, si elle non plus n´est pas à l´abri des contestations et protestations populaires, de celles des partis politiques de l´opposition et des organisations de la société civile, alors pourquoi ne pas laisser la tâche au Premier Ministre en place d´assumer la gouvernance provisoire au cours des 90 ou 120 jours prévus? Pourquoi cette vente aux enchères de la présidence provisoire? Nous ne sommes pas loin de donner raison à Martelly qui, en partant, a rappelé l´attitude des affamés de pouvoir et schizophrènes de la pratique ôte-toi de là que je m´y mette. Dans un pareil cas, il est incertain que cette formule produise des effets positifs. Elle va créer d´autres animosités, parce que non seulement ces parlementaires réduisent la crise à un simple facteur institutionnel, mais surtout parce qu´il est impropre, indécent, indigne et indignant que ce soit encore eux qui s´impliquent dans cette marchandisation de la présidence. 

     Néanmoins, s´il était souhaitable qu´un compromis soit trouvé entre les différents acteurs de la crise, cela n´a pas été fait. De ce fait, il est prudent que le parlement arrête de se mettre en avantgardisme dans ses excès. Le Parlement tel qu´il est constitué aujourd´hui est problématique, donc il ne peut pas prétendre être capable d´un quelconque résultat aux problèmes originels dont il fait aussi partie. La crise est pourtant loin d´être résolue, elle est amoindrie. Elle peut exploser à n´importe quel moment et cette entente en sera une des causes. Si actuellement Martelly c´est du passé - bien que beaucoup de gens l´aient toujours considéré comme une page regrettable d´histoire depuis longtemps tournée - cela ne veut  aucunement dire que les luttes fratricides traditionnelles pour le pouvoir disparaissent. Et c´est ce à quoi nous sommes exposés avec ce dépot des pièces prévu dans ce parlement délabré. Le poste de la présidence provisoire sera accordé aux plus offrants. Quelle république de conards!

     Enfin, mis à part les dangers de l´après Martelly auxquels la république est exposée, l´histoire retiendra la déliquescence à laquelle la Présidence en particulier et l´État en général ont été réduits sous le règne de M. Martelly. Ce fut le règne de l´immoralité, du non respect pour le genre humain (les femmes en particulier), pour la presse, pour le peuple haitien et pour les serviteurs de l´État, de la délinquance étatique, du banditisme et gangtérisme institutionnel, de la corruption consentie et érigée en norme, de la fuite des genres de bien et honnêtes et l´affichage en public des malfrats. En tout cela, le plus important est de tourner à jamais et définitivement cette page de notre histoire de peuple. Pour que cela soit, il est impératif que le peuple soit éduqué, qu´il y ait un devoir de mémoire dès l´enfance et une écritute historique et sociologique sur ce règne obscurantiste à la Boyer.

Jean  FABIEN

Campinas, 8 février 2016

dimanche 7 février 2016

LA MÉRINGUE CARNAVALESQUE 2016 DE SWEET MICKY: ENTRE INDIGNATION COLLECTIVE ET OPPORTUNITÉ DE COMBATTRE L´IMPUNITÉ?

     Introduction

     C´est une attitude avisée, intelligente, rationnelle et logique de ne jamais apprécier et/ou critiquer quelque chose pas avant d´en avoir pris connaissance. Ceux et celles qui ont choisi de ne pas écouter la méringue carnavalesque de Michel Martelly pour éviter de s´en prononcer, peut-être, ont-ils agi sagement bien! Le contraire aurait été pir, c´est-à-dire se positionner sur quelque chose dont on ignore. Mais, ceux et celles qui se sentent malades, maniaques et radicaux des valeurs humaines, se battent pour le respect, la dignité et la moralité de l´être humain et ont pris connaissance de cette méringue, ne peuvent ne pas sortir de leur mutisme pour dire NON à ces types de pratiques démoralisantes et dénigrantes au sein de la société haitienne. À cet effet donc, ils accomplissent leur devoir de citoyen, car, de même que la mort d´un homme est celle de tout homme, l´insulte dont est victime un citoyen atteint non seulement la citoyenneté et la démocratie en elles-mêmes, mais encore  tout citoyen indistinctement.
     C´est ce qui m´a poussé d´ailleurs - afin de pouvoir mieux orienter mes réflexions - à aller à la rencontre de cette méringue carnavalesque du groupe Sweet Micky à la tête duquel se trouve le chanteur Michel Martelly, transporté accidentellement comme président d´Haiti depuis le 14 mai 2011. Néanmoins, connaissant le groupe et son chanteur vedette pour ses dévergondages, ses propos salissants, ses déhanchages avilissants, ses tons poligomènes, ses grivoiseries, enfin, ses attaques personnelles et blessantes (rappellons-nous ses polémiques avec les groupes tels que Mizik Mizik, T-Vice etc.) dans le cadre du carnaval, je n´aurais même pas besoin d´aller écoûter cette méringue pour savoir qu´elle serait à un niveau si déréglé et démoralisant. Écrire un article sur un tel sujet est la dernière tâche à laquelle je me serais consacré. Il propose donc une réflexion autour de notre culture d´impunité vis-à-vis des propos psychologiquement suicidogènes d´où qu´ils viennent afin d´y entrevoir les conséquences d´une auto-destruction ou encore d´un auto-assassinat et de comprendre si cette méringue - une dérive de plus - n´offre pas une opportunité favorable d´initier le combat contre l´impunité à ce niveau.

Notre culture d´impunité

     Dans une société à mentalité appauvrie, il faudrait s´attendre que des saletés pareilles refassent surface. Et, quand les choses prennent une telle tournure et parviennent à un stade de putréfaction, il est complice de se taire, quand la conjoncture l´exige, il est impératif de s´exprimer. En effet, cette méringue, pour l´avoir écoutée, revèle, à mon sens, un problème fondamental grave d´impunité au sens collectif, qui, malheureusement, est l´un des éléments sur lesquels le groupe Sweet Micky a construit ses succès les plus fous en Haiti. Fort de ces constats, il y a lieu de souligner une culture d´impunité qui s´érige en norme au sein de la société haitienne et d´où découlent tous les maux qui nous auto-détruisent et nous auto-assassinent.
     Seule l´impunité - entendue comme refus ou absence de sanctions collectives - pouvait amener un individu à se servir des moments carnavalesques, qui auraient dû être l´expression de la beauté culturelle et artitistique d´Haiti, pour le règlement de ses comptes personnels avec des individus qui, de surcroît, ne font pas partie du même univers musical que lui, ce en leur lançant des propos déshonorants en plus. Même dans des polémiques rivales entre groupes musicaux - en période carnavalesque bien sûr, même si celle-ci tend de plus en plus à devenir une scène d´avilissement et de moquerie, une marchandisation corporelle - il n´est pas permis de tout dire ni tout accepter dans une société qui veut se construire sur le respect mutuel entre citoyens, leur égalité en matière du droit d´expression, de la jouissance des droits et libertés individuels et la valorisation de ses membres et de ses institutions .
     En dépit de tout, pour avoir ciblé des personalités dont le seul péché commis est de s´être prononcées sur la gestion des choses de la cité, ce qui est normal en toute démocratie digne de ce nom, cette méringue s´est acquise une certaine popularité en plus, car, que l´on veuille ou non, elle a, d´un côté, son propre public et ce serait étonnant que ce dernier ne s´en soit pas déjà assouvi en dégustant les grivoiseries de son chanteur admiré, elle n´est pas le produit de n´importe qui, mais celle d´un grand chanteur en même temps président de l´autre. Mais, le comble, c´est que, par ailleurs, elle nous animalise quand elle se véhicule, à l´échelle mondiale, avec une image d´indissociabilité avec une institution si prestigieuse qu´est la présidence.

     Si la vitesse avec laquelle court cette impunité, arme aux multiples tranchants qui nous auto-détruit et nous auto-assassine, n´est pas freinée, il est vain de croire, d´une part, que M. Jean Monard et Mm. Paul soient les dernières victimes de Sweet Micky ou d´une quelconque formation musicale, que la société soit en mesure de sanctionner tout contrefait qui va dans le même sens d´autre part. En effet, ce n´est pas pour la première fois que le groupe Sweet Micky, en saison carnavalesque, s´attaque à des individus ou groupes d´individus en employant des mots durs d´oreille. Le groupe ainsi que son chanteur, dont il incarne le style, est réputé pour ses comportements outrageants et tapageurs. Il est de ses habitudes de le faire soit directement ou indirectement. Souvenons-nous de ses propos déshonorants et irrevérentieux, qu´il est inutile de reprendre ici, lancés à l´endroit de nos deux anciens chefs d´État, en l´occurrence Ms. Aritide et Préval? Pas besoin de rappeler ceux encore plus blessants dans ses polémiques avec les groupes tels que Mizik Mizik et T-vice au point que ce dernier a même failli prendre le chemin de la justice pour injures graves selon les dires des proches. Dans son règne de Sweet Micky, M. Martelly était et demeure encore un tout-puissant chef de fil des méringues répugnantes. Il s´est tellement complu dans le titre d´un chanteur aux mots ronfflants et vulgaires qu´il y a consacré tout un album. Jusque là aucune sanction collective, morale ou institutionnelle n´a été appliquée. Le pir c´est que les groupes qui s´adonnent à dérives y puisent leurs ''succès''. C´est une impunité consentie qui est plus cancérigène que l´impunité elle -même.

     Cependant, la méringue ''Bal bannan n lan'' de Sweet Micky a suscité l´indignation et la colère d´une forte partie de la société. C´est une grande première. Il est vrai qu´il faille avoir une première fois en tout, par contre, je m´interroge sur l´intérêt et le bien fondé de cette prise de conscience. Car, cela fait plus d´un 1/4 de siècle depuis que Sweet Micky outrage la société en exposant ses genres d´affiche. Les méringues de Sweet Micky ont toujours été contre l´intégrité humaine, des attaques personnelles, des dénigrements aux femmes, des attitudes irrespectueuses envers les enfants, des injures à n´en point finir qui rabaissent toute une société et ternissent l´image de tout un peuple. Pendant ce temps, beaucoup se taisaient, alors pourquoi c´est aujourd´hui qu´elles foueillent la conscience collective? En d´autres termes, si cela ne date pas d´hier, qu´est-ce qui explique que c´est cette méringue qui révolte tant la conscience collective? En fait, dans le contexte socio-politique actuel, il paraît évident que les propos de Sweet Micky fassent autant de dégats dans une société qui ne finit jamais d´en compter et ne sait plus où les mettre. Sur ce, quelques faits sont susceptibles d´expliquer cette nouvelle prise de conscience.

Comprendre pourquoi la conscience collective s´est révoltée contre cette méringue

     En premier lieu, contrairement aux autres arguments, je pense que les impacts et discussions que provoque cette méringue sont dûs plus au refus de la société à la banalisation et à la désacralisation de son sacré. Quel que puisse être le niveau de civilisation ou de dérive auquel une société pourrait parvenir, s´il y a une chose avec laquelle elle répugne toute plainsetrie et moquerie c´est son sacré, ce qui veut dire que la sacralisation est constitutive et immanente à toute société humaine. Les choses sociales sacrées sont intouchables, inviolables et immuables. Les institutions sociales représentent le symbole manifeste de ce sacré et quand elles sont foulées au pied c´est le sacré lui-même qui est atteint. Et quand le sacré se trouve en difficulté, la société devient une espèce de pyramide: elle est renversée y compris ses valeurs, ses croyances, ses institutions et sa culture. La Présidence en est une. Donc, lorsqu´elle est désacralisée, cela ne peut que révolter les consciences collectives. Ce manque de respect et de révérence envers le sacré, disons mieux la Présidence, est la preuve conséquente d´un conflit de personalité et d´identité qui domine depuis longtemps le Sweet Micky dévergondé et le Michel Martelly président malgré lui.

     En second lieu, il est clair que cette méringue qui provoque la dégénérescence  du sacré affecte plus la société que les personnages qu´elle cible, à savoir, M. Jean Monard Mételus de la RTVC (Radio Télévision Caraibes) et Mm. Lilliane Pierre Paul de la Radio Kiskeya. En fait, elle est plus accentuée sur cette dame à qui la société haitienne doit honneur et respect. Mais, évitant de réduire la situation à ces deux personnages, il convient de la comprendre à un niveau beaucoup plus élevé et rationnel de telle sorte que nous gardons en mémoire la méringue intimement ratachée à cette conflictualité de caractère, d´identité et de personalité. Car, je suis convaincu que si c´était Michel Martelly dans son costume ordinaire et tradionnel de Sweet Micky qui avait produit cette méringe, les démangeaisons auraient été autres. En dépit des respects à devoir à ces journalistes aux langages dérangeants parce qu´ils dénoncent l´inacceptable d´un régime et se battent pour une vraie démocratie, il est recommandé de leur éviter un culte de personalité - ce qu´ils n´aimeraient pas d´ailleurs, j´en suis sûr - en les faisant passer pour des seules victimes expiatoires, en oubliant que c´est la société haitienne tout entière qui souffre de ces dérives socio-musicaux pas seulement de Sweet Micky mais aussi de tout autre groupe qui profite du carnaval pour susciter des nuisances sonores et des intoxications musicales faute d´une panne d´inspiration, d´imagination et de créativité dans les textes.

Comprendre les moyens et le fondement des répliques de Michel Martelly dit Sweet Micky

   De par ses talents de musicien, ses tempéraments et entant que vieux routier du carnaval, M. Martelly ne pouvait répliquer à ses opposants que par une méringue carnavalesques dans le but même de provoquer et de montrer qu´il garde toujours sa casquette de Sweet Micky dans tout son compartiment et intégralité. Il fallait s´y attendre, car il ne pouvait faire autrement. En outre, si l´intellectuel a sa plume, le journaliste son micro comme armes de combat pour se défendre, il est normal d´admettre aussi que l´arme de tout musicien constitue sa musique: l´arme défensive avec laquelle il gagne son pain et mène son combat de tous les jours. C´est sa manière originale à lui de se riposter aux attaques qui le visent directement ou indirectement. Malheureusement, vu leur agressivité, leur état violent et leur niveau d´intolérance, les propos de M. Martelly ont fait preuve d´une grande faiblesse en matière de débats contradictoires et son incapacité à accepter et à vivre avec les idées contraires.
     L´État ne change jamais les individus, ce sont les individus qui changent l´État ou tout au moins le réduisent à leur image. Voilà pourquoi, sur M. Martelly l´État a revêtu l´habit de Sweet Micky, a épousé ses modèles et a été transformé à son image. C´était vain de penser pouvoir changer M. Martelly pour la simple raison qu´il est devenu président, une présidence survenue, on le sait, dans des conditions que nous savons tous déjà, comme une insulte au peuple haitien et preuve probante du mépris de sa volonté dans les décisions ultimes concernant son propre avenir. La présidence qui est, en quelque sorte, un récipient vide et sans contenu, ne change non plus les individus. C´est les individus dont elle est investie qui constituent son contenu et lui projettent une image. Il est donc cruel de demander à quelqu´un de changer et d´exiger de lui ce qui est dans son impossibilité de rendre. Le changement est une décision autoréflective même s´il dépend de certains facteurs extérieurs et de l´environnement social et culturel.
     J´estime bien au contraire que M. Martelly a fait des efforts de surpassement, car, franchement, hormis ses nombreuses sorties tapageuses et provocatrices, je m´attendais au pir. Une ou des conférences de presse en jupette et corsage, disons, en Sweet Micky quoi!! Une méringue carnavalesque dévergondée chaque année durant son mandat pour faire du tac au tac avec ses opposants! Le peuple haitien, de sa part, a prouvé ces derniers temps une certaine maturité, car s´il a pu tolérer pendant cinq ans les agisssements nauséabonds d´un individu qui passe toute sa vie à se moquer des gens, à les rabaisser, à les ravaler en se servant des blagues, à les banaliser et à les dénigrer, c´est qu´il a un peu grandi.

     Mais, n´est-ce pas une lâcheté et une incohérence grave de l´identification ou de la mauvaise sélection de ses opposants qui ont poussé M. Martelly à se jeter dans ces boues carnavalesques puantes dans les dernières heures qui suivent la fin de son règne? En réalité, M. Monard et Mm. Paul sont loin d´être les individus les plus farouchement opposés à M. Martelly, donc ses propos révulsants dans cette méringue sont signe d´une lâcheté et d´une incohérence palpable entre ce qu´il représente entant que chef d´État malgré tout et les propos qu´il laisse entendre dans cette méringue. Où laisse-t-on un André Michel, un Moise Jean-Charles et d´autres à la langue aussi tranchante et radicale que ces deux journalistes, poignardante et provocatrice que celle de Sweet Micky. Au contraire, je considère ces journalistes, surtout M. Monard, comme des potentiels conseillers non salariés et indirects de M. Martelly durant son règne. Ils ne se sont pas attellés seulement à le critiquer, mais aussi à proposer des portes de sorties à un president qui, semble-t-il, n´écoutait même pas ses conseillers.
     Dans leurs propos, j´ai toujours retrouvé de l´équilibre et je peux dire franchement que leur aide a outrepassé le journalisme traditionnel qui se contente d´ordinaire d´informer, de divulguer des nouvelles sans faire des analyses critiques et proposer lucidement quelques solutions rationnelles. Mais, l´arrongance et la grosse tête ont eu raison de M. Martelly. Avec son altruisme et son ego, qui ce monsieur écoute? Outre la lâcheté, c´est peut-être un sentiment de regret qui l´a mené à descendre dans cet égout. Il se sert de la musique, qui court plus vite que les commentaires et analyses politico-journalistiques de M. Monard et les nouvelles de 4h Mm. Pierre Paul. Elle est susceptible de recevoir de nombreux ''j´aime'' et ''vues'' sur la toile d´arraignée et les réseaux sociaux grâce auxquels son audition atteindra désormais un public au-delà des frontières.

Considérations finales

     Somme toute, en Haiti, nous sommes confrontés à des problèmes graves et profonds: ceux de la perversité et de l´impunité sont les plus courantes. Malheureusement, certaines perversités produisent, dans des circonstances historiques particulières, des effets positifs. C´est ce qui s´est passé avec M. Martelly. En effet, en l´ayant empêché de passer aux festivités carnavalesques depuis son arrivée au pouvoir, M. Martelly a imposé une sanction injuste et injustifiée au groupe Brothers Posse, à cause de son chanteur vedette Don Kato qui, pour des raisons que l´on ne sait pas, s´est fait l´opposant farouche du régime en divulguant des méringues carnavalesques polémiques. Conséquemment, cet acte, au lieu d´avoir détrui et anéanti l´artiste, a de préférence renforcé et raffermi sa popularité. En plus, il est aujourd´hui ''sénateur'' si l´on tient compte qu´il est issu des niaiseries appelées maladroitement  ''élections'' des 9 août et 25 octobre 2015. Que serait le renforcement de la célébrité de Don Kato sans les imbécilités de M. Martelly?
     D´autre part, concernant Jean Monard et Liliane, la méringue a servi de stimulus pour montrer la profondeur et l´immensité de l´affection, de l´amour et de l´attachement fidèles et infinis d´une grande branche de la société à ces deux journalistes. Il fallait que cela arrive pour comprendre que la société n´a pas totalement lâché prises face aux malversations. Des brins d´espoir de la lutte contre les débauches et les perversions bourgeoises luisent encore sur Haiti. On n´a pas tout perdu. Cette méringue honteuse a fait suite à de nombreuses initiatives et soirées d´hommages tant en Hait qu´à l´étranger en l´honneur de ces deux valeureux et courageux journalistes. En fait, cela exprime la volonté de la société de rompre avec ces pratiques malsaines et répugnantes en périodes carnavalesques afin de faire du carnaval la fete culturelle et artistique embélissante et merveilleuse qu´elle était auparavant. Est-ce le signal d´un combat collectif contre l´impunité dont nous avons soif qui s´annonce? Je l´espère. Car, il n´est jamais trop tard pour inicier une révolution contre quoique ce soit y compris la méringue fétide de M. Martelly.
     Néanmoins, qu´il ne s´agisse pas d´un combat deux poids deux mesures, que ce soit un vrai combat contre l´impunité que nous offre cette méringue révoltante. Certes, ses impacts sont plus forts et désastreux à cause de son personage et de l´institution qu´il incarne, mais, le plaçant dans son statut de simple citoyen, il est justiciable à tout acte qui lui est reproché. Autant de dire que d´autres groupes qui auraient l´intention de reproduire ces dérives doivent être touchés par cette sanction collective que nous voulons tous.

Jean FABIEN

Campinas, 7 février 2016

dimanche 24 janvier 2016

L´HISTOIRE RETIENDRA...

    Malgré sa situation de faim atroce dont il souffre courageusement jour et nuit - comme je l´ai fait remarquer dans un article publié le 18 janvier 2016 - le peuple haitien a montré que quand il se réveille, quand il sort de son sommeil, il est capable de grands exploits, il peut faire des choses extraordinaires et mêmes surprenantes. C´est une révolution sociale qui s´annonce, et, en devant en être conscient, le peuple ne doit pas s´arrêter là, il faut qu´il aille jusqu´à être gagnant de ses propres révolutions. En effet, la majorité populaire qui réclamait le renvoi des journées ''électorales'' prévues pour le 24 janvier 2016 a finalement eu gain de cause: le CEP décrié a fait marche arrière en annonçant, le vendredi 22 janvier dans l´après-midi, l´annulation de celles-ci. Couvert par la honte, le CEP a fait mention dans sa note d´un repport sine die, mais, en fait, il s´agit d´une annulation pure et simple. Cette note en elle-même annonce pas seulement l´annulation des soi-disant élections à organiser en cette date, mais surtout la caducité du CEP lui-même. 
     Par ailleurs, cette nouvelle est loin d´être surprenante, car tous les signes montraient clairement qu´il était impossible au CEP de franchir la frontière du NON au 24 janvier du peuple haitien, malgré certaines réticences à l´admettre. Sinon, il fallait s´attendre au pir que ce qui s´est produit au cours des principales journées de manifestations et de révendications des 21 et 22 janvier où il y a eu des casses, des incendies, des vols, des victimes en vie humaine, des arrestations, des emprisonnements forcés etc. En tout cela, les responsabilités tombent sur le CEP, l´exécutif et tous ceux-là, acteurs nationaux et internationaux, qui criaient aveuglement en Avant dans un contexte aussi fragile et voulaient poser un défi au peuple haitien. 

Ce que l´histoire doit retenir de cette annulation 

     L´histoire retiendra que cette annulation traduit pour le peuple haitien une première victoire sur la soumission aveugle et sourde de ses dirigeants aux étrangers, un pas vers la révolution sociale qui doit avoir lieu, une gifle au Département d´État Américain, à l´Élysée, à l´Ambassade du Canada et à l´Union Européenne qui, commettant toujours de l´ingérence dans les affaires d´Haiti et voulant induire en erreur les gouvernements haitiens, criaient Adelante à un soi-disant processus électoral entaché de toutes les fraudes du monde. Mais le peuple y a vigoureusement riposté. Par  ailleurs, elle exprime une déception pour le gouvernement en place qui vient de perdre complètement la confiance de ses parisans et la crédibilité du peuple; un refus à accepter l´autorité de ce dernier. 
     Que l´histoire, qu´elle soit haitienne ou mondiale, retienne cette date dans la vie socio-politique du peuple haitien qui, à travers ses multiples manifestations et révendications ces derniers jours, demande à ces barons internationaux de se mettre à l´écart de la vie politique haitienne et de laisser au peuple haitien le soin de résoudre ses propres crises tout en leur lançant un signal fort pour le futur de ce qui pourra arriver s´ils s´entêtent dans cette voie. Néanmoins, cette alerte doit nous concerner d´abord parce qu´en plusieurs occasions nous montrons notre incapacité à gérer nos crises internes.

     L´histoire retiendra que le peuple haitien, bien que pauvre et miséreux, ne se laisse pas marcher sur les pieds, sa révolte et ses soulèvements sont toujours la preuve que, en dépit de tout, son NON est irrévocable. C´est une erreur grave - et je l´ai montré dans un article publié en 2011 - d´avoir eu un homme comme M. Martelly à la tête de la suprême magistrature haitienne, il n´était pas possible par conséquent d´encaisser une autre bétise plus affreuse que celle du 24 janvier avec ce dernier. 

     L´histoire retiendra une fois de plus que le peuple haitien résiste à toute tentative de piétiner ses droits politiques les plus élémentaires, par exemple, ses droits à la manifestation, au vote, à la révendication, à l´autodétermination, à dire NON dont il est parfaitement conscient. De plus, si le peuple est contraint, malgré lui, de tolérer dans une certaine mesure que ses droits sociaux comme ceux à la nourriture, à l´eau, au travail, au logement, peuvent être constamment, continuellement et quotidiennement violés, il ne peut pas accepter le pir, c´est-à-dire la violation de ses droits politiques, le peu qui lui reste pour survivre. Ce n´est pas que ceux-ci soient plus importants que ceux-là, mais parce que seules les luttes politiques mènent vers le progrès social.

     Toutefois, que personne, ni le peuple ni l´opposition politique ne se rejouisse pas si vite après cette défaite du CEP. Mais, nous devons y entrevoir de préférence une véritable honte pour nous autres Haitiens qui aimons forcer l´impossible et attendre qu´une catastrophe, si évidente et prévisible soit-elle, arrive avant de nous rendre compte de ses conséquences désastreuses, enfin, nous avons l´art de nous rejouir dans nos propres malheurs. Cette annulation si tardive est une preuve palpable que nous avons des dirigeants irresponsables et incapables d´agir sur les problèmes avant qu´ils ne se dégénèrent, de gérer les institutions comme il le faut, car les vrais dirigeants ne sont pas ceux qui agissent sur les problèmes au moment où ils se produisent, mais qui savent les prévoir, vont au-devant d´eux et ont la capacité et la lucidité de prendre toutes les dispositions nécessaires afin qu´ils ne débouchent sur des catastrophes. 
     Ce qui s´est passé, ce vendredi 22 janvier 2016, est une catastrophe parce que, tant prévisible qu´il fut, nous n´aurions pas dû en arriver là.  Voilà pourquoi, il ne faut pas vite s´enorgueillir, mais plutôt réfléchir et travailler afin que, plus jamais, des dirigeants comme ceux du CEP n´exposent le pays à de telles situations désastreuses ni n´essaient de lancer un défi au peuple haitien. 
     Même si le départ de M. Martelly est évident et que théoriquement ou symboliquement son administration se conjugue au passé composé, il convient de préparer ce départ de telle sorte que les mêmes erreurs de 2004 ne se reproduisent plus. En effet, après le renversement de M. Aristide en 2004 par l´opposition et les luttes des étudiants, c´est Washington lui-même qui a imposé le premier ministre Gerard Latortue au peuple haitien qui, bien que victorieux de ce renversement, en a été le principal perdant. Cela ne doit plus se répéter. 

Le rôle de l´opposition

     Le rôle de l´opposition dans cette annulation a été crucial et s´est manifesté par les mobilisations populaires et les manifestations continuelles. Elle a été impécable dans son combat contre la gouvernance de M. Martelly depuis l´arrivée de ce dernier à la tête de l´État de telle sorte que nous pouvons dire qu´elle nous a épargné certaines actions plus graves auxquelles celle-ci aurait pu exposer le pays. Néanmoins, son manque de structuration, d´organisation et de cohérence a fini par remonter le moral à ce régime qui était sur le point de sombrer. Voilà pourquoi, si elle veut rester forte, vivante et efficace, elle devrait s´abstenir de tout poste politique au sein de la transition. Dans le contexte de la crise actuelle, elle devrait plutôt jouer le rôle d´accompagnatrice du peuple dans ses révendications politiques, d´orientatrice et de préparatrice de la prochaine transition politique d´après M. Martelly pour non seulement mieux gérer et savourer cette victoire avec le peuple, mais surtout c´est le moment de définir un autre contrat social et politique pour le pays. 

     Même s´il paraît normal qu´une opposition aspire à des postes politiques, dans le contexte actuel, il serait préférable qu´elle s´en écarte pour éviter qu´il ne s´agisse d´un ''Ôte-toi que je m´y mette'' tel qu´il se pratique malsainement dans la culture politique haitienne. C´est une pratique avec laquelle il faut rompre. Si cette opposition va s´entredéchirer pour des postes politiques - ce qui arrive ordinairement - alors là les luttes menées auparavant seront vaines et demain c´est contre elle que ce peuple en retour se lèvera. Les barons étrangers qui dominent Haiti, il faut le savoir, sont un liquide qui prend toujours la forme du récipient qui le contient et un caméléon qui épouse la couleur de la cible qu´il cotoie. Étant très intelligents et jouant actuellement ses dernières cartes pour reprendre le controle de la situation en Haiti, ils seraient probablement en train de voir dans quelle mesure où ils pourraient collaborer avec les potentiels acteurs politiques, car, de toutes les façons, ils ont du mal à digérer ces gifles imposées au CEP et à l´exécutif, qui les affectent aussi vu qu´ils les soutenaient, et à sortir perdants de la crise. 

     Par ailleurs, pour le bien être du pays et l´avenir politique d´Haiti, nous avons besoin d´une opposition forte et structurée telle qu´elle a surgi sur la gouvernance de M. Martelly sans ignorer pour autant qu´il a lui-même contribué à la création et à la constitution de celle-ci à travers ses dérives. Une opposition qui, en défendant les principes démocratiques, parvient au pouvoir par la voie des élections et non dans le cadre d´une transition ne serait-ce que pour le respect des règles d´éthique. Une opposition dans un pouvoir de transition me semble être un échec de l´opposition elle-même et une contradiction flagrante des principes démocratiques pour lesquels elle se bat. Elle se creusera son propre trou et préparera sa défaite s´il veut accéder au pouvoir dans un tel contexte de transition. S´il faut admettre que le seul et unique moyen de parvenir légalement et légitimement au pouvoir c´est par les élections, alors l´opposition qui a combattu les dérives d´un pouvoir survenu dans les conditions que nous le savons, doit passer par le même chemin pour le simple respect de la démocratie. Par conséquent, il est souhaitable qu´elle reste à l´écart du pouvoir politique et joue le rôle que lui assigne l´histoire tout en se renforçant davantage. Enfin, c´est une opposition qu´il faut entrevoir d´ores et déjà se soulever même contre la transition politique, qui surviendra après le départ de M. Martelly, dans le cas où cette dernière continuerait les mêmes pratiques de l´ancien régime.

Le dilemme victorieux et gagnant

     Le peuple a une fois de plus mis en déroute ses détracteurs, mais sortira-t-il gagnant ou victorieux des luttes qu´il mène? L´histoire a déjà prouvé que nous sommes autant capables de grandes révolutions que piètres, médiocres et impotents à les gérer convenablement sans une main étrangère au-dessus. Le peuple en sort toujours perdant parce que le plus souvent ses problèmes sociaux ne sont jamais pris en considération. Nos proverbes disant: ''Aprè bal tanbou lou'', ''Bourik travay pou chwal galonen'' sont malheureusement une réalité qui nous surprend et nous tombe constamment dessus à chaque événement. Autrement dit, il y a toujours un ou des intrus internationaux à s´infiltrer ou à faire irruption dans nos affaires politiques pour venir prendre le controle de nos révolutions afin d´en donner l´orientation qui leur convient par le fait que généralement nous nous montrons incompétents de gérer la victoire de nos propres luttes. Certes, l´échec des journées du 24 janvier s´avère une victoire du peuple haitien, il en est victorieux mais pas encore gagnant, car il est fort probable qu´il ne jouisse pas cette victoire. Quand les hommes politiques disent: ''Viktwa pou pèp la'', ils savent très bien ce qu´ils disent. Ils ont parfaitement raison de dire cela et disent vrai en plus, car, en vérité, le peuple est toujours victorieux mais jamais gagnant. 

     ''Que le peuple se contente de sa victoire et la contemple avec joie, tandis que, eux-mêmes, les acteus politiques, ils se jouissent de son gain: privilèges économiques, ascension sociale, pouvoir politique etc'', déclarent-ils impitoyablement. Pour le présent moment, dans le contexte de cet échec du CEP et de l´exécutif, le peuple est victorieux, il est souhaitable qu´il en soit aussi gagnant. En différenciant victotieux et gagnant, il est important de rappeler que, historiquement parlant, les gagnants des crises politiques en Haiti sont toujours un corps étranger et le peuple dans tout cela n´est qu´un admirateur honteux et méprisé d´une victoire mémorielle qui, le plus souvent, ne lui laisse que des souvenirs amers. Quand on réclame que le peuple soit à la fois victorieux et gagnant cela sous-entend qu´après les luttes pour lesquelles nombreux de ses fils et filles ont sacrifié leur vie, il est impératif d´entrevoir un véritable changement de ses conditions de vie sociale et économique. C´est ce vers quoi il faudrait tendre!

Des incertitudes aux évidences

     Après le 24 janvier, le 7 février est encore une autre date très préoccupante tant pour le peuple haitien que pour les opposants à la gouvernance de M. Martelly. Nombreux sont ceux qui se demandent ce qui va se passer dans les jours avenirs: 1- M. Martelly laissera-t-il le pouvoir? 2- Si oui à qui puisque techniquement parlant il est impossible d´avoir un président élu avant le 7 février pour le remplacer constitutionnellement? 3- Si non, comment partira-t-il, de gré ou de force? 4- Aura-t-il une transition politique telle que le veut depuis bien longtemps l´opposition? 5- Y aura-t-il un consensus politique qui permetterait à M. Martelly de rester provisoirement au pouvoir jusqu´à l´arrivée de son successeur issu d´une vraie élection? En tout cela, il existe un dernier cas où il peut être forcé de partir avant même cette date.

     D´entre le jeu le cinquième scénario n´est même pas imaginable entre une opposition si radicale et un Martelly à tempérament récidiviste. De plus, même si une telle proposition aurait été soutenue à M. Martelly, il devrait la refuser, ce pour deux raisons. D´une part, un minimum de moralité et d´éthique - loin delà de dire que M. Martelly est un homme moral - ne lui permet pas de rester au pouvoir, il est évident qu´il parte en laissant la gestion du pouvoir aux acteurs politiques qui décideront de l´avenir politique d´Haiti. La tâche de la destinée politique du pays ne lui appartiendra plus à l´expiration de cette échéance constitutionnelle. Pour permettre de délier la crise politique actuelle, il est prudent qu´il n´évoque pas l´article de la constitution qui veut que le président ait pour devoir de garantir le bon fonctionnement des institutions, car, avec ou sans un président prêt à investir le pouvoir pour le succéder, après le 7 février, M. Martelly perdra tout droit que lui confère la constitution et toute légitimité, donc il ne pourra rien gérer ni controler. 

     D´autre part, pour son bien-être et celui de sa famille, il est mieux qu´il laisse le pouvoir le 7 février pour ne pas compliquer et envénimer davantage la crise et rendre sa situation et celle de sa famille encore plus grave et difficile. En outre, il  y va de son intérêt à ce qu´il parte du pouvoir bien - sans être exilé bien entendu - après tout ce qu´il a fait à ce pays. Son entêtement d´y rester - ce qui ne devrait même pas être envisageable - justifiera ou la méconnaissance de M. Martelly des réalités socio-politiques du pays ou sa méchanceté à le faire exploser. Car, tenant compte de tout ce qui vient de se passer, de tout ce qu´il a fait durant son règne au pouvoir, il n´est pas certain qu´un seul élément de l´opposition acceptera de passer une seule seconde de plus avec ce monsieur dont on s´empresse de débarasser le plus vite parce qu´il devient indésirable. Ainsi, il reste, de toute évidence, que ce CEP de M. Opont a échoué, n´existe plus et M. Martelly partira quoiqu´il advienne le 7 février ou même avant, de gré ou de force, ce pour son bien et celui du pays. Alors, il s´agit maintenant de penser l´après Martelly non seulement en terme de la gestion des pouvoirs exécutif, judiciaire et législatif, des secteurs social, politique et économique, mais encore en ce qui concerne le soi-disant processus électoral brutalement interrompu.

     Il est clair que, le 7 février 2016, nous allons vers une phase transitoire. Ce qu´il fallait à tout prix éviter. Mais, comment se fera-t-elle? C´est là l´épineuse question à laquelle il n´est pas facile de trouver une réponse.

 La transition politique

     En effet, après le 7 février 2016 - dans l´esprit du respect de l´échéance constitutionnelle de M. Martelly - la transition, qui doit être la responsabilité de l´opposition et des associations sociales, économiques et politiques nationales, entrera en jeu. Une fois installée, elle ne pourra pas tout faire et tout résoudre en même temps, c´est d´ailleurs la prétention qu´elle ne doit avoir ni l´erreur qu´elle ne doit commettre. En toute logique, il ne reviendrait pas à l´opposition d´être dans le pouvoir, mais de préparer et d´orienter correctement la transition politique et de veiller sur ce gouvernement de transition comme elle l´a fait auparavant, car si elle en fait partie, elle ne pourra pas le combattre en cas de dérives, mais créera d´autres oppositions parallèles. La transition elle-même doit préparer la scène politique afin qu´il y ait un accord duquel découlera un nouveau CEP qui organisera de réelles et vraies élections qui accoucheront des élus légitimes. 

     Pour qu´elle soit efficace, celle-ci doit préparer la future gouvernance démocratique du pays pour les cinq prochaines années tout en évitant des dépenses exorbitantes et inutiles et d´aller dans la même ligne des jouissances économiques malsaines et corruptibles de l´ancien régime soit par l´irrespect de son delai constitutionnel, qui est généralement de 90 jours, soit en cherchant à le prolonger par de faux prétextes. Son rôle fondamental est l´organisation des élections pour que le Palais national soit officiellement et définitivement occupé par un président correctement élu. Parallèlement, elle peut, très légèrement, agir sur quelques problèmes techniques sans esprit d´excès ni d´extravagance. 

     Le peuple, de sa part, doit éviter de réclamer de cette transition ce qui lui est, techniquement et chronologiquement, impossible de réaliser. Car, le plus souvent, au-delà de la volonté manifeste des hommes de la transition d´y rester, le peuple qui les exige l´impossible les incite aussi à violer le delai qui leur est imparti. Que le peuple sache, d´une part, que le rôle principal et fondamental de la transition est de le mener vers de vraies et correctes élections pour lesquelles il ne cesse de se battre, d´autre part, que ses problèmes cruciaux et profonds seront abordés par les dirigeants qu´il aura choisis dans ces élections. La seule chose qu´il doit exiger de cette transition est le respect de son delai et la tenue de vraies et correctes élections. Haiti, par le truchement de cette transition, a devant elle une grande opportunié d´un changement social et politique radical. Par contre, dans le cas d´une mauvaise gestion de celle-ci par la répétition des mêmes erreurs, c´est la catastrophe totale. Alors, en tant que peuple, il ne nous restera qu´à nous enterrer nous mêmes, car, le peu de dignité qui nous restera aura été anéantie. Ainsi, non seulement nous allons tout droit vers l´abîme, mais encore nous allons donner raison, pour une inième fois, à ceux-là, nationaux et étrangers, qui sont convaincus que nous sommes ingouvernables.

Considérations générales

     Somme toute, le peuple haitien a franchi une étape importante dans son histoire et sa vie politique en montrant sa capacité, son courage et sa détermination à dire non à l´indésirable et à l´inacceptable. Mais, il lui reste un combat plus consistant et profond à mener, celui pour l´amélioration de sa vie sociale et économique de tous les jours pour lui, ses fils et petits fils. À force de gaspiller des énergies à se battre à chaque fois pour les mêmes choses, à refaire les mêmes erreurs grotesques (complot, trahison et conspiration pour le pouvoir) non seulement les situations du peuple restent inchangées, mais encore le pays s´enfonce dans la monotonie voire l´immobilisme, car les plans de sortie de crise des transitions passées accusent toujours de beaucoup de faiblesse de vision. Il est important que cette étape franchie ne soit pas minimisée, mais doive de préférence permettre d´espérer un mieux être et un avenir meilleur pour le pays. L´histoire doit retenir, en 2016, comment le peuple haitien s´est déterminé à être seul maître de sa vie sociale et politique même s´il doit compter sur la collaboration de certains acteurs internationaux. À quoi devrait-il s´attendre dans les jours avenirs puisque M. Martelly c´est du passé? Laissons donc à l´avenir et au temps de dire le reste!

Campinas, 24 janvier 2016

lundi 18 janvier 2016

POURQUOI CE CEP S´ENTÊTE-T-IL À LA DATE DU 24 JANVIER 2016?

Introduction

     À chaque fois qu´il nous est offerte l´opportunité de parler de la situation politique d´Haiti, nous devons faire attention pour ne pas tomber dans un exercice répétitivement lassant en reprenant les mêmes propos, surtout ceux se rapportant à l´ingérence et à la domination étrangère voulue par une minorité minoritaire de la classe dirigeante haitienne. Pourtant, à l´attitude amorphe, passive et endormie du peuple haitien face à ce phénomène et aux situations déconcertantes qui l´enfoncent dans la misère, on ne s´intéresse guère. Or, elle joue un rôle essentiel dans l´état critique d´Haiti -, cela depuis longtemps -, et, plus particulièrement dans cette impasse électoraliste actuelle qui guète en ce moment la population entière. Car, si cela n´était vrai, il serait inconcevable et incompréhensible tout cet archarnement, ce zèle, ce désir, ce dévouement à l´aveuglette pour organiser des ''élections'' qui, en réalité, n´en sont pas unes. Donc, la situation politique qui prévaut présentement dans le pays est dominée par ce qu´on appelle très improprement ''élections''.
     C´est un mot que nous ne cessons de sacrifier, vilipender, galvauder, avilir et employer vainement. Je ne vais pas m´attarder là-dessus, car, à maintes occasions dans plusieurs articles, je me suis évertué à montrer que, tant qu´Haiti ne s´érige pas en un vrai État libre, autonome, indépendant et souverain, il faut banir du vocabulaire politique haitien ce mot. Or, fort heureusement pour nous autres Haitiens, il n´existe pas encore un tribunal national ou international correctionel qui chargerait de juger et condamner - si la culpabilité en a été établie - les peuples ou les ressortissants de ces pays qui font un usage malveillant, méchant, abusif et déshonorant des expressions telles que démocratie, élection, souveraineté, indépendance pour ne absolument rien dire. Voilà pourquoi, quand nous sommes entrain de parler d´Haiti et que vient le moment d´employer le mot élection, pas des moindres bien entendu, il faut le mettre entre mille et mille guillemets. L´objectif de cet article est donc de montrer que l´endormissement du peuple est l´une des causes principales de l´entêtement du CEP à l´organisation des ''élections'' prévues pour le 24 janvier. Mais, bien avant d´analyser le sens et la logique de cette passivité du peuple haitien afin d´essayer d´en dégager une certaine compréhension des raisons de cet entêtement, il convient de rappeler le contexte socio-politique.

Mise en contexte

      Dans quelques articles que j´ai publiés sur mon blog, je me suis mis, à maintes fois, à montrer que si cette souveraineté d´avoir des processus électoraux fiables pouvant accoucher des élus légitimes, est perdue depuis belle lurette, alors il convient de comprendre que le 9 août aussi bien que le 25 octobre 2015, il n´y a jamais eu à proprement parler d´élections en Haiti. Bien qu´il y ait eu des boycottes populaires généralisés, le CEP a eu l´audace de crier à la réussite totale en entraînant avec lui dans cette voie de contentement d´autres instances tant nationales qu´internationales. Il n´y a pas moyen d´en parler vu que ces dits processus contiennent une main étrangère puissante qui les manipule et, de surcroît, sont toujours truqués et foulés au pied en ce sens que le choix du peuple n´est jamais réellement celui qui s´impose. En effet, cela est dû parce que tous les Conseils Électoraux Provisoires (CEP), passés et présents - ainsi que beaucoup d´autres institutions clés de la république d´ailleurs - sont sous le controle des barons nationaux et internationaux. Ce mot éléction a un autre sens pour nous autres Haitiens, c´est une nomination qui se fait sous le couvert d´une stratégie électoraliste par ceux que j´appelle les barons internationaux d´Haiti, à savoir, États Unis, Union Européenne, France et Canada. Il y en a aussi des nationaux, mais, lâches qu´ils sont et traitres de la patrie qu´ils demeurent, ils se renferment derrière les internationaux pour mieux collaborer avec eux, du genre ni vu ni connu.

     Le contexte politique actuel découle directement des journées catastrophiques des 9 août et 25 octobre 2015 et il est souhaitable que ce 24 janvier 2016 annoncé avec entêtement, folie, frénésie et obsession par un CEP apparemment drogué, envoûté ou ensorcellé, n´ait pas lieu,  sinon il faudra se préparer au pir. Il paraît que les dirigeants haitiens ont l´expertise de persister et perdurer dans l´erreur, même quand ils voient de loin le malheur venir, ils s´entêtent à tomber dedans. La journée du 24 janvier - s´il viendrait à se produire, ce qui est d´ailleurs en toute vraisemblance impossible - ne changera pas grand'chose ni dans la forme ni dans le fond de ces démagogies produites les 9 août et 25 octobre de l´an dernier. Néanmoins, si le peuple consent à y participer - ce qui ne devrait même pas être imaginable - ou s´en montre passif comme d´habitude, alors il se suicidera lui-même. Alors, si les deux côtés le mal est infini, le temps lui est venu donc de sortir de son endormissement.
     En conséquence, avec un parlement tordu, un CEP têtu, une classe politique amorphe, une société civile endormie, une classe économique qui fait acte de mutisme, un environnement presqu´insauvable, sur le plan politique - sans omettre pour autant la décente aux enfers de la vie sociale et économique des masses pauvres - l´année 2016 s´annonce très douloureuse pour notre Haiti chérie et je doute fort que les jours avenirs soient cléments pour elle. En effet, la logique la plus élémentaire au monde veut que si A = B, B = C alors A = C, en d´autres termes, si en 2015 il n´y a pas eu d´élection à proprement parler, il ne peut y avoir d´élus en 2016. S´il y en a, qui sont-ils et d´où viennent-ils? Alors, tous ceux qui, issus de ces journées problématiques et catastrophiques des 9 août et 25 octobre 2015, ont accepté et avalé ce qui s´est produit le dimanche 10 janvier dans la soirée (à la chambre des députés) et le lundi 11 janvier 2016 dans l´après-midi (au sénat), doivent savoir qu´ils portent la lourde et entière responsabilité d´être les potentiels assassins de ce peuple et ont son sang sur la main. Dans le désintérêt total et pour le malheur absolu du peuple, ces différentes journées ont été une insulte, une honte et une déception au plus degré aux yeux de l´humanité. Ainsi, mis à part tous les problèmes endurés au cours de 2015, si l´année 2016 se montre déjà très affreuse et amère pour le peuple haitien c´est bien à cause de ces dates de malheur.

     Dans cette circonstance, que peut-on espérer de ce groupe de parlementaires qui, victimes de l´entêtement d´un CEP empétré dans la honte, ont fait l´objet de nombreuses contestations et suspicions? Quel résultat positif ou satisfaisant pourrait-on attendre d´une rentrée parlementaire qui s´est réalisée dans la plus parfaite clandestinité, ce en violant les normes constitutionnelles selon lesquelles la rentrée parlementaire doit se faire le deuxième lundi du mois de janvier? Qu´est-ce qu´un tel parlement pourra-t-il produire de bon quand le processus qui l´a engendré symbolise la crise en lui-même? A noter que cela est dû, conséquemment, à la décrédibilisation en amont du CEP, institution mère qui serait chargée de garantir la fiabilité et la légitimité des élus. Sur ce, on peut dire rien et absolument rien puisque ceux-là qui se prennent pour des ''parlementaires'' n´ont pas aidé le CEP à se ressaisir de ses gaffes incalculables, mais se voyaient déjà au petit mont des affaires. Je ne remets pas, toutefois, ni en doute ni en cause leur éventuelle bonne volonté et bonne foi de jeter une goutte d´eau dans cet océan de résolution de crises de toute nature qui nous tiennent prisoniers en Haiti depuis des décennies, mais les conditions dans lesquelles ils sont parvenus. Car, si le processus est vicié en amont à cause de l´état démoralisant et dévergondé de l´institution qui l´organise, en l´occurrence le CEP, il est normal que ses effets le soient pareils, de ce fait, pouvoir, oui, ces derniers en auront, mais dans la honte, le mépris et l´absence totale d´autorité, de légitimité et de respect de leur statut de parlementaire. Ceci est valable pour n´importe quel poste électif vilipendé. Ainsi, contesté, rejeté et problématique, il faut déjà entrevoir dans le 24 janvier - s´il a lieu - le véritable règne de l´ingouvernabilité en Haiti.

     Mais, en dépit de tout cela, nous devons nous poser la question de savoir pourquoi ce CEP, malgré les protestations, les contestations et les graves accusations portées contre certains de ses membres, bien qu´il soit complètement dépouillé de toute honnêteté, intégrité et crédibilité et que ses membres s´égrainent ainsi, s´entête-t-il à maintenir la date du 24 janvier? Pourquoi enfin un CEP tant décrié et avili veut-il à tout prix organiser ce qu´il appellera malsainement ''élections''? Dans la tentative de répondre à cette question, l´article propose de réflechir autour de l´hypothèse suivante: il paraît que le peuple haitien soit plongé dans un endormissement continu.

Les Haitiens dorment et s´endorment encore

     Il y a une faim atroce en Haiti et quand on a faim, nous dit le philosophe indien Amartya Sen, on est complètement dépourvu de toute force de lutter et de combattre contre l´oppression et la domination violente bourgeoise. Voilà pourquoi, poursuit-il, les peuples les plus soumis de la terre sont ceux qui souffrent le plus de la faim chronique. Donc, la faim pour le prix Nobel de l´économie, est une arme puissante utilisée par la classe dominante pour maintenir voire enterrer violemment les pauvres en les zombifiant. C´est cette zombification que j´assimile à une action d´endormissement. Car, n´était-ce pas un tel endormissement ou une telle zombification imposés par la faim, comment le peuple pourrait-il accepter si passivement et docilement qu´un président exige 45 millions de gourdes pour le renforcement de sa sécurité, que les per diem des Hauts dignitaires de l´État, à commencer par le président, soient triplé de valeur, que le salaire des soi-disant conseillers électoraux, sans compter les frais de service, passe de 124 milles gourdes à 240 milles gourdes sans aucune loi au préalable que, enfin, que ses dirigeants vivent dans un luxe agaçant, provocateur et s´offrent les plus belles choses du monde au détriment des pauvres qui crèvent de faim? Toutefois, il ne s´agit ici que d´une infime partie des multitudes de malversation de ses dirigeants, passés et présents, que le peuple a daigné accepter de consommer sans piper mot.

     Si nous dormons ou nous nous laissons endormir c´est que nous avons été zombifiés du plus profond de notre âme, de notre être et de notre intelligence, car la zombification est le fait de la faim. Comprenez bien que notre faim est loin d´être naturelle ou voulue par un dieu, elle nous a été violemment imposée par ceux qui veulent nous dominer économiquement. Cette faim nous exige à laisser passer, à accepter voire consommer le pir. Ce qui veut dire que l´entêtement du CEP à conduire le peuple haitien à la boucherie, ce 24 janvier 2016, n´est rien devant les multiples cas de corruptions à répétition qui proviennent de l´intérieur des structures étatiques. Puisque nous avons faim, nous n´avons plus la force physique pour combattre encore moins la force morale pour réflechir et comprendre. Parce que nous avons faim, en plein crise, pendant que les pauvres malheureux du programme insipide EDE PÈP, travaillant dans le secteur des cantines populaires, réclament les 13 mois d´arriérées de salaires, ce CEP aux vices kleptomaniques, s´est lui-même arrogé le droit de doubler le salaire de ses employés, ce en absence d´une loi définissant les motifs et les justificatifs d´un tel ajustement. Parce que nous avons faim, donc endormis et zombifiés, il nous est impossible de voir que notre avenir ainsi que celui de nos fils et petits fils sont complètement hypothéqués. Car, n´était-ce pas cet état, la révolution sociale, la seule qui soit libératrice pour le peuple, devrait déjà avoir lieu. Néanmoins, il n´est pas trop tard pour que le peuple se réveille, car il en reste encore quelques-uns qui gardent encore la vigueur et la force.

     En réalité, le peuple ne s´est pas endormi de son plein gré, il a été contraint d´y être plongé à cause des conditions sociales et économiques qui lui sont imposées. La faim dont il souffre porte la marque d´une puissance dominatrice. Voilà pourquoi, pour sortir de cet endormissement, il a besoin de briser ce spectre de la faim. Mais, on oublie assez souvent une autre facette de la faim, celle qui suscite la violence du peuple et engendre un peuple violent. Cette violence du peuple consiste à mettre un terme à sa faim en se donnant lui-même à manger. Elle est légitime dans la mesure où seul ce moyen lui est favorable pour parvenir à cet objectif. La faim tue au même titre que la guerre et les conflits sociaux violents. Elle est même plus meurtrière que ces conflits puisqu´elle tue chaque année des millions d´être humains, en particuliers, des enfants étant les plus vulnérables. Les deux Guerres mondiales mises ensemble ne peuvent égaler le nombre de morts causé annuellement par la faim dans le monde. En tout de cause, il vaudrait mieux mourir en luttant contre la faim que de vivoter en portant la croix d´une faim de honte et d´humiliation.  Car, de toutes les manières, le peuple est pris entre deux situations meurtrières: la faim (s´il accepte de mourir de faim) et la violence (s´il choisit d´en sortir). Il est vrai que le plaidoyer n´est pas expplicitement sur la faim, mais, puisque c´est elle qui endormit le peuple, c´est par elle qu´il a été domestiqué, c´est elle, en tant qu´arme puissante, qu´utilise la bourgeoisie économique pour le faire gémir, supplier et baver en même temps, alors c´est par elle qu´il faut passer pour comprendre la gentillesse, la passivitié et la docilité du peuple haitien.

     De plus, à cause de cet état passif de grand dormeur, le peuple continue de souffrir les conséquences de l´impunité et s´en fait complice. Si nous restons toujours dans des cas concernant le CEP, rappelons-nous de l´ex-président du CEP Gaillot Dorsainville qui circule tranquilement dans les rues haitiennes après avoir lui-même déclaré qu´en 2010 les résultats ayant porté ce M. Martelly à la présidende d´Haiti étaient loin d´être celles qui ont été officielement admises au sein du conseil. En d´autres termes, pour mieux comprendre, M. Dorsainville s´est fait tirer les oreilles par ses patrons internationaux, qui nomment les gens qu´ils veulent à l´intérieur de l´État, afin de nommer celui que le peuple n´a point choisi. C´est ainsi que cela fonctionne en Haiti, ce territoire peuplé d´individus. Si, depuis lors, la justice, à travers le commissaire du gouvernement, s´affirme impuissante de le poursuivre, alors il est aussi normal que ce M. Opont accouche de tels résultats aujourd´hui, car il sait pertinemment que c´est le même sort qui l´attend. Un peuple qui dort et se laisse endormir oublie facilement.

     Tout ce qui est entrain de se passer aujourd´hui au sein de la société est voulu par le peuple haitien qui se perd dans cet endormissement. Si ce CEP se croit invincible parce qu´il compterait sur un quelconque appui des quatre barons, c´est bien à cause de la passivité et de l´amorphisme de la société haitienne. Ainsi, si j´avais à blâmer, ce serait moins le CEP dans son entêtement que le peuple dans son endormissement, car, je le répète, c´est parce qu´il dors que le CEP est ainsi têtu comme un âne. C´est parce qu´il dort que ce CEP veut en finir avec lui, l´étrangler et l´anéantir définitivement en le précipitant dans cet abîme du 24 janvier. En effet, au-delà de tout soupçon, le 24 janvier confirmera ou infirmera si réellement le peuple haitien accepte de démeurer mauribond, passif, amorphe, endormi ou mort. Dans les vraies sociétés démocratiques où le pouvoir découle réellement du peuple, non pas en discours, mais en acte, un CEP si dévoyé et dénudé, où les intérêts économiques exhorbitants l´emportent sur l´intégrité, n´a pas sa place. Le jour où il ne le voudra plus, il ne s´endormira pas, il ne se laissera plus jamais zombifier, mais prendra de préférence la voie de la révolution, car, comme l´a si bien dit Thomas Sankara, seule la lutte libère. 

     À cause de cet endormissement, enfin, il se laisse entraîner dans le jeu mafieux ''élection-nomination'' de l´international sans avoir le discernement de comprendre qu´il est un pion que celui-ci utilise à chaque fois qu´il a besoin de lui, puis, après l´avoir exploité, il ne le jette pas, le conserve en lieu sûr: la misère, la faim et la pauvreté afin de le rendre de plus en plus indébile et incapable de toute initiative de résistance et de révolution, car il est un pion pas trop précieux, mais quand bien même important vu qu´il aide à faire le jeu. Au reste, il est complice de ses propres situations puisque, en dépit de tout, d´une façon ou d´une autre, cet endormissement, qui est aussi une forme de domination, il l´accepte, le reconnaît et le confirme. Dans la culture haitienne, l´endormissement survient généralement comme une fausse solution à l´appaisement de la faim, pourtant, causé lui-même et imposé par la faim, il est notre plus grand ennemi. La faim est une violence symbolique consistant à maintenir le peuple dans une attitude de soumission zombificatrice. 

Considérations finales

     En résumé, l´entêtement du CEP provient du fait que le peuple refuse de prendre son destin en main par la révolution . À cause de la faim, on le fait passer pour de véritables clowns en l´exposant à toute sorte d´imbécilités, d´idioties et de grimasseries. Or, avec un minimum d´intélligence, de connaissance et de lucidité, même s´il a faim, le peuple a besoin d´avoir la capacité de comprendre que quand il accepte ces genres de situations telles que celles dans lesquelles le CEP l´avait entrainé les 9 août et 25 octobre et celles auxquelles il veut l´astreindre, le 24 janvier prochain, il se fait complice de son propre sort, par conséquent, personne n´aura pitié de lui. Il faut qu´il comprenne en effet dans quelle merde il se fourre en choisissant de participer à ces genres de niaiseries et de conneries dont il devrait s´abstenir. Ce n´est pas parce qu´il a faim, pauvre et misérable, qu´il doit accepter n´importe quoi. Pour redefinir un autre contrat social, la révolution sociale par les luttes durables et continues du peuple est la seule et unique option. Donc, il est temps que le peuple sorte de cet endormissement dominateur, de ce sommeil à la fois importé et local, car si sommes-nous arrivés à ce stade de pourriture des dérives pas seulement au niveau du CEP, mais également au niveau de toutes les autres structures de l´État qui travaillent contre le peuple, c´est bien à cause du fait d´accepter de rester à genoux, et même dans cette position d´assouplissement envouteur, ils nous frappent. Autrement dit, le CEP aurait déjà renoncé à ce rêve enchanteur du 24 janvier si le peuple n´était pas plongé dans un tel état endormisseur. Enfin, je voudrais terminer l´article avec cette phrase d´un philosophe français, Étienne de la Boétie (1547): ''Les tyrans ne sont grands que parce que nous sommes à genoux''. En d´autres termes, nous pouvons dire: Périsse le peuple qui dors et se laisse endormir!



Campinas, 18 janvier 2016