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jeudi 30 juin 2016

LE RACISME ET L´AMOUR: ENTRE TRIOMPHE ET MÉCONNAISSANCE

Résumé

          C´est mythique et même utopique de croire que l´union conjugale entre blancs et noirs serait un signe de diminution ou de baisse du racisme dans la société ou une forme de lutte contre ce phénomène. Sans toutefois ignorer qu´à un certain niveau cette stratégie pourrait porter des fruits, il est indécent de croire que le racisme a sa place dans l´amour. Il faut donc éviter de se fier à l´apparence. De nos jours, le racisme invisible triomphe de fait des sentiments d´amour, voilà pourquoi il est difficile voire impossible d´analyser ses impacts sur l´amour parce qu´il est inexpressif. L´objectif donc de cet article est de réfléchir sur les éventualités de débordement et de triomphe du racisme sur l´amour qu´il rend méconnaissable, ce, par une discussão sur l´impossibilité des rapports entre le racisme et l´amour, et en cherchant également à comprendre pourquoi l´amour se retracte dès fois face au racisme en nette croissance dans les sociétés contemporaines.

Introduction

           Je ne me suis jamais intéressé à l´idée d´écrire un article sur le racisme jusqu´au jour où ce phénomène ne me frappe fortement à l´esprit parce qu´il a atteint l´amour. Le sujet ne me préoccupait guère, par conséquent, il m´importait peu d´en parler non pas parce j´ai voulu l´ignorer, le rabaisser, le minimiser, le ridiculiser, l´étouffer ou le banaliser bien qu´il ne cesse de frapper toutes les sociétés humaines, surtout celle du Brésil où je suis entrain de l´expérimenter, mais pour la simple raison que je m´exerçais, m´attelais et m´efforçais par des réflexions hautement ontologiques à le dépasser en essayant de m´écarter autant que se peut des idéologies et idées reçues dont il est issu. C´est de cette manière depuis que je m´applique à combattre ce mal de l´humanité dans ses racines. Cela n´empêche néanmoins qu´il s´accumule des victimes directes et collatérales.
          Pour moi, même si le racisme est une construction sociale, culturelle et historique des sociétés, elle demeure malheureusement une déformation psychologique et mentale et s´inscrit dans un processus de socialisation exagéré ou raté de l´individu. Il y eut un déséquilibre mental en ce qui a trait à l´éducation sur l´étude de l´homme. Un éminent anthropologue haitien du XIXème siècle du nom d´Anténor Firmin, qu´il est essentiel de citer, a non seulement refuté les thèses raciales, racistes et homophobes pendant longtemps maintenues par l´Occident, mais a surtout prouvé par ses nombreuses recherches théoriques et empiriques la fausseté de la théorie de la supériorité d´une race. Toute théorie raciste se fondant sur la dévalorisation et la destruction de l´être humain est vouée à un vibrant échec là où il y a des hommes qui voient en tout homme un architecte de ce monde. S´il existe une race, bien que ce ne soit pas sûr qu´il en existe une, ce serait l´humanité, répète Firmin (Firmin, 1885).
          Ainsi, si je me résous à sortir de ce mutisme en prenant l´initiative d´écrire sur ce sujet c´est parce que je constate que de nos jours, dans les sociétés traversées par de profondes inégalités sociales et discriminations raciales, le racisme triomphe de plus en plus de l´amour, déborde les relations amoureuses entre des personnes de couleurs différentes (un blanc et une noire par exemple) et rend ces relations de plus en plus douloureuses en faisant d´elles une espèce de fardeau, de calamité et d´humiliation. Le mythisme et l´utopisme sont caractéristiques mêmes de telles relations. En d´autres termes, c´est se plonger dans la pure abstraction que de croire que l´union conjugale entre blancs et noirs signifierait à dire que la société est moins raciste aujourd´hui qu´aupravant. Dans cet article, nous aimerions, d´une part, réfléchir sur le caractère impossible des relations entre le racisme et l´amour, comprendre dans quel but se font les unions interraciales de l´autre.

Racisme et amour: Une relation impossible?

          L´amour ne s´explique pas. L´amour se vit. Il est toujours bon de goûter à ses fruits dont le plus grand pour moi est le respect de l´autre. Mais, le racisme est une façon d´inférioriser l´autre en se supériorisant soi-même. L´amour s´aveugle tant physiquement que psychologiquement pour se libérer de ces absurdités de supériorité ou d´infériorité. Il est difficile de dire quand l´amour est ''raciste'' et quand il ne l´est pas, parce que l´amour est un choix alorsque le racisme est une imposition. Alors, l´on constate d´ores et déjà le rapport dichotomique qui s´établit entre les deux notions. Mais, quand le racisme s´invite dans les relations amoureuses, les choses changent complètement: ce n´est pas que l´amour ait perdu de poids ou se soit affaibli, mais parce qu´il en surgit une méconnaissance et une mécompréhension de ce que c´est que réellement le sentiment d´amour. Quand le racisme s´invite dérechef dans une histoire d´amour, il n´en résulte que de l´humiliation, la déception, l´amertume et la haine. De plus, le racisme transforme le sentiment d´amour en une sorte de pitié, de faveur et de grâce envers l´autre. Or, l´amour ce n´est pas faire un usage à outrance des sentiments compassionnels, mais c´est s´aimer soi-même et traiter l´autre comme soi-même.

          Prenons un simple exemple, celui du mulâtre. D´un point de vue historique et sociologique, le mulâtre est le fruit du viol d´une esclave noire par son maître blanc. Lorsque celle-ci a été contrainte d´avoir des relations sexuelles, pas amoureuses, avec un blanc, elle a fini par mettre au monde un produit du racisme. En fait, le mulâtrisme est l´expression manifeste de la chosification de la femme et de la bestialité du genre humain. Or, que l´on veuille ou pas, il s´agit de deux êtres qui, bien qu´ils s´ignorent complètement les uns aux autres, parce que chacun vit dans son propre monde, se retrouvent paradoxalement ensemble une ou plusieurs fois dans des situations intrigantes et peineuses. Le blanc ne sera aucunement obligé de reconnaître le nouveau-né en tant que son enfant voire lui donner un acte de naissance. Généralement le prix à payer c´est l´affranchissement qui, étant une courtoisie du maître, devient une solution aux ignominies commises par lui sur son esclave. De même qu´une relation amoureuse proprement dite entre maître et esclave est nettement impossible, une quelconque tentative de rencontre entre racisme et amour est vaine, car ce sont deux choses complètement incompatibles et indissociables. 

          Dans le cas de l´esclave et du maître, il n´y a pas lieu de parler de relation amoureuse à moins qu´on cherche à banaliser cette notion. En outre, c´est même un non sens d´utiliser ce terme dans le cadre colonial, car la femme en plus d´être la chose du colonisateur, elle est également son esclave sexuelle. Toute relation amoureuse suppose un consentement, une volonté et une liberté. Or, ces trois choses ont été totalement banies de la vie des esclaves, objet de leur maître. Les colonies sont des lieux ignobles où se dégradent toutes les bonnes vertus du monde y compris l´amour. La colonie en elle-même est la négation de l´amour même pour des esclaves entre eux, car quelqu´un qui est dans les fers peut être certes traversé par le sentiment d´aimer, mais il goûtte très peu aux véritables fruits de l´amour en tant que tel. Ce n´est pas exagéré de dire qu´il ne sait même pas ce qu´il est, malgré qu´il faille admettre que l´amour se manifeste par un élan naturel. Il est naturel d´aimer, il est bon et beau de dire que l´amour vient tout naturellement, par contre il est aussi une construction. Cette naturalité de l´amour se perd dès l´instant même qu´on n´apprend pas à le construire, le valoriser, le fortifier, le comprendre et le renforcer. L´amour va au-delà de ''aimer''. Il est intarissablement continu malgré les petits moments de souffrance et de douleur. 

          Prenons un autre exemple d´un couple qui jouit de l´amour depuis leur 25 ans de vie conjugale. Cela voudrait-il dire qu´il n´a jamais passé par des difficultés, souffrances, douleurs et autres? Bien sûr que non, mais l´amour leur a permis de triompher de toutes ces choses parce qu´il était la base de leur relation. Pas la peine de faire un longue plaidoyer sur l´amour en reprenant la fameuse définition de l´Apôtre Paul connue de tous pour ne pas tomber dans une sorte de religiosité. Toutefois, l´amour ne peut pas, ne doit pas et ne saurait sous aucune forme se mêler au racisme parce qu´il est une contamination pour lui. S´il n´est pas possible de concevoir le sacré sans le profane parce que l´un valorise l´autre, il est par contre absoluement impossible de voir l´amour s´établir, se triompher là où le racisme s´impose. L´amour est méconnaissable dans le racisme. Comme cela arriva dans les colonies, c´est toujours un miracle, un événement extraordinaire et une merveille que de voir un blanc accepter de vivre avec une négresse et d´avoir avec elle des enfants. C´est déjà une expression de pitié et de faveur envers elle parce qu´elle ne le mérite pas. Il ne peut y avoir amour dans un tel cas puisque l´amour n´est pas synonyme de pitié pour l´autre. Personne ne mérite d´être aimé par pitié, faveur ou grâce mais plutôt par respect, consentement, volonté et valeur.

Les Unions interraciales: Expression d´amour, stratégie de lutte contre le racisme ou m´as-tu vu?

         Si le racisme et l´amour demeurent séparablement opposés et évoluent dans une éternelle relation de continuité et de contradiction, il n´est pas néanmoins évident que cela puisse arrêter le cours des unions interraciales qui, selon une très fausse modestie, seraient susceptibles d´être une forme de lutte contre le racisme. Si cette interprétation peut être tenue pour vraie, elle est aussi grave que le racisme qui rentre dans l´amour pour faire de lui un sentiment de compassion pour l´autre. Dans ce cas, l´amour n´est ni la base ni la condition de ces unions, mais plutôt une prétention - une fausse prétention d´ailleurs - de croire pouvoir combattre le racisme à travers ce canal qui est loin d´en être un. Au Brésil, par exemple, une société majoritairement noire, il y a eu une nette évolution des mariages interraciaux qui, entre autre, creusent de plus en plus les fossés inégalitaires et racistes entre blancs, noirs et métisses, que ce soit sur le plan économique, politique, racial ou social. Dans cette société d´une culture raciste camouflée, les femmes noires ont moins de chance d´être épousées par un blanc tandis que l´écart est grandement élevé pour un noir d´épouser une blanche. Pourquoi? Selon plusieurs analystes des relations interraciales au Brésil, les noirs détiennent une supériorité économique relative, ils se trouvent cependant à un niveau d´infériorité raciale. Alors, pour compenser cette infériorité, ils sont même prêts à dépenser des fortunes pour épouser une blanche, ce, en vue de jouir de cette supériorité raciale que possèdent leurs rivaux blancs. Mais, malgré cette évolution il demeure jusqu´à présent que, dans la société brésilienne, les races continuent de se marier entre elles dans un esprit de conservatisme racial. Les hommes noirs ont de plus en plus d´affinités pour les femmes noires, c´est idem pour les blancs. 

          Néanmoins, il est fort difficile d´établir de façon claire par des données statistiques encore moins par des études scientifico-démographiques les raisons qui pousseraient un blanc à préférer une blanche à une noire et vice versa au point de voir découler d´une telle préférence un mariage. Est-ce par position sociale, par affinité raciale, par liens éthniques, par moyens économiques ou par amour? En matière de relation amoureuse et même de mariages interraciaux, il est impossible de spécifier exactement ce qui en est le mobile. S´il est économique ou purement sentimental. Sur cette même rubrique de mariages interraciaux, il y a ce que l´anglais appelle le ''marry up'', les mariages qui se font pour des avantages économiques. Ces genres de mariages sont très courants aux État-Unis surtout quand ils peuvent procurer une obtention de Green Card à l´un des conjoints. Dans le cas du racisme, qui est moins économique que psychologique et social, cela se fait également: Les races se croisent, se rencontrent et s´unissent dans le cadre d´un marry up dont l´objectif est la recherche d´un prestige social suivi bien évidemment d´une ascention sociale. Toutefois, une chose est certaine c´est que même si les relations interraciales subissent des transformations et des variations, que les croisements interraciaux par le mariage ou les relations libres deviennent de plus en plus fréquents, ces faits ne suffisent pour combattre le racisme. Ils sont loin de prouver un quelconque métissage de la société, donc ils ne réduisent pas pour autant les actes ignobles de racisme, d´homophobie, de machisme et préjugé dont sont victimes les populations noires. Autrement dit, les mariages entre blancs, noirs ou mulâtres sont loin d´être l´expression d´un combat contre le racisme ou contre la discrimination raciale. 

          C´est vrai aussi que nous n´avons pas les moyens méthodologiques de vérifier si l´union entre un blanc et une noire ou une blanche avec un noir ne se fonde pas réellement et honnêtement sur l´amour, mais, étant donné que, d´une part, le racisme est à la fois un phénomène social et une construction historico-culturel, les luttes contre ce phénomène donnent généralement de fausses impressions, alors on est en droit de douter de la véracité de l´amour qui caractériserait cette relation. Certains l´interprètent comme une espèce de m´as-tu vu, d´autres comme une fierté d´ascension sociale pour le noir toujours en position d´infériorité raciale, d´autres encore y entrevoient une expression d´amour et font fi de tout aspect raciste, car, selon eux, le racisme n´a pas sa place dans l´amour, et, l´amour ne saurait être l´amour en tant que tel au sein du racisme. Sur ce sujet, les opinions ne cessent et ne vont s´arrêter de diverger.
        Par ailleurs, il est également exagérant d´assimiler au racisme tout refus d´une blanche d´entretenir des relations amoureuses ou sexuelles avec un noir et vice versa, puisqu´en dépit du fait que l´amour est une préférence et non une obligation, il a aussi ses règles et ses principes: les principes que chacun s´impose à lui-même pour faire son choix. Toutefois, ils ne lui appartiennent pas tous, ses principes, la majorité est sociale et provient de la société. Donc, en d´autres termes, personne n´est obligé d´aimer personne. Chacun est libre de choisir la personne de son goût pour faire sa vie, la personnes avec qui il veut partager sa vie. Ce n´est ni sur le refus ni sur le racisme qui serait derrière qu´il faut insister, mais sur le respect du sentiment de la personne. Ainsi, dans les deux sens, dans les deux extremités le rapport est impossible même si, par contre, rien ne prouve que ce refus n´ait pas été effectivement motivé par des idées racistes reçues à l´enfance et à la jeunesse dans les milieux environnemental, éducationnel et socio-culturel. 

Conclusion

          Enfin de compte,  la relation entre le racisme et l´amour demeure réellement un mythe. On peut la qualifier aussi de rapport de force, car, en dépit de tout, le racisme triomphe de ses abérations et absurdités tandis que l´amour est méconnaissable parce qu´il souffre. C´est également un débat mort-né parce que, entre eux, aucune entente n´est envisageable. Néanmoins, même si l´amour se dit être aveugle et n´avoir aucune limite, il est des cas que les séquelles et les agressivités du racisme lui imposent de véritables obstacles pour ne pas dire des limites. Il paraît que dans les débats contemporains à caractère sociologique et psychologique sur les rapports entre le racisme et l´amour, celui-ci invite celui-là à sortir de son aveuglette pour regarder la réalité en face. Ce doute nous amène donc à conclure l´article avec la question suivante: L´amour obéit-il aux principes du coeur ou de la tête; à ceux de la raison ou de la passion?

Jean FABIEN

Campinas, 30 Juin 2016

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