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''TÉMOIGNAGES VIVANTS'' (Troisième Partie): PENSÉES SPÉCIALES


12 JANVIER 2013: PENSÉES SPÉCIALES

À 16h53 c´est l´heure qui nous a fait voir toutes les couleurs de l´arc-en-ciel. Pendant une minute, la nature nous a fait verser de grandes larmes amères nous rendant, à nos jours, inconsolables de ceux-là à l´égard desquels nous exprimions un amour et une passion  profonds. Cette journée nous rappelle le séisme d´une magnitude 7 sur l´échelle de Richter, le plus puissant et le plus meurtrier dans toute l´hisoire haitienne, qui a complètement détruit notre Haiti chérie le 12 janvier 2010. C´est la nature qui s´est mise en colère contre Haiti. Si ce fut un individu ou un état qui était à la base de tout cela, la justice nationale ou internationale auraient du pain sur la planche. Mais Hélas! Quand la nature réclame des comptes, il n´y a absolument rien à faire. En cette journée mémorable, je voudrais partager ces quelques pensées spéciales pour marquer cet événement.

La mort est indéfinissable et personne ne s´y est jamais habitué, elle s´avère un passage obligé, un triste rendez-vous auquel, nous tous, qui que nous soyons, devons répondre  un jour. La mort mérite d´être perçue comme un voyage à  l´extraodinaire en comparaison à celui qui s´effectue ordinairement dans la vie courante. Dans le cadre de la mort, le voyageur attend dans un lieu sûr à ce que ses proches, amis et membres de famille l´y rejoignent, donc elle est un vol ou une croisière obligatoire que nous ne pouvons nous permettre de rater. La mort se veut être, par ailleurs, le prolongement de la vie dans une autre dimension, voilà pourquoi les chrétiens suivant leur croyance en Dieu chantent lanmò se fèmen zye w isiba epi louvri l lòtbò.  Ils ne vénèrent ni n´honorent les morts comme le font les vodouisants, mais ils accordent un profond respect à leur mémoire tout en espérant qu´ils sont dans la présence de Dieu pourvu que durant leur existence leur vie Lui ait été totalement consacrée. De ce fait, ils célèbrent de préférence dans la mort la vie, mais une vie dans l´au-delà. Si la mort physique est le fait que le corps soit privé de son âme, cela sous-entend que l´âme est immortelle et indestructible. Ainsi donc, nous espérons que l´âme des victimes de cette catastrophe repose en paix.

Où qu´ils se trouvent, notre devoir en ce jour est de leur accorder un moment de réflexion et de recueillement. Il est vrai que les conditions dans lesquelles ils sont partis furent subites et imprévues, mais l´essenciel c´est que nous savions qu´un jour ils devaient laisser ce monde. Quoique l´on fasse, personne ne recevra un avertissement de la part de la mort, la seule façon de s´y préparer est de se reconnaître comme la vapeur qui, en même temps, apparait et disparait. La Bible nous apprend d´une manière claire, simple et intelligible sur la fragilité de l´existence de l´homme en disant: '' L´homme! Ses jours sont comme l´herbe, il fleurit comme la fleur des champs. Lorsqu´un vent passe sur elle, elle n´est plus, et le lieu qu´elle occupait ne la reconnaît plus'' (Psaumes 103: 15-16). Pendant notre existence, nous devons nous efforcer d´accomplir de bonnes oeuvres de crainte que nous ne regrettions l´instant où nous devrons disparaître. Comme de la vapeur, ces 300 000 personnes nous ont laissés sans recevoir de sépulture, de veillée, de funérailles, d´oraisons funèbres, sans même nous donner le temps de leur dire au revoir, sans leur rendre un dernier hommage. Nous ne detenons aucun pouvoir, aucune puissance, aucune autorité de fixer le jour de notre mort voire faire revenir ceux-là qui se sont séparés de nous, nous ne pouvons que les pleurer en attendant que notre heure arrive. La mort nous saisit fréquemment et nous laisse assez souvent dans une profonde perplexité. Un écrivain eut à dire que la mort est la plus cruelle et impitoyable des choses qui puissent exister. Dans ses Odes à Dupérier, inconsolabe du décès de sa fille, le poète français François de Malherbe (1555-1628) a écrit:

'' La mort à des rigueurs à nulle autre pareille; 
On a beau la prier, 
La cruelle qu´elle est se bouche les oreilles
Et nous laisse crier.''


Ainsi, pour une troisième fois, en ce 12 janvier 2013, nous nous inclinons respectueusement et religieusement devant la mémoire de nos 300 000 frères et soeurs. Nous leur disons honnêtement que leur départ a plongé le pays en entier dans une profonde tristesse. Cependant, nous regrettons de dire aux proches de ces disparus de ne pas se lamenter sur leur sort parce que là où ils sont, ils sont mieux qu´eux. Nous autres survivants de cette catastrophe sommes entrain de vivoter dans une Haiti qui se cherche. . En outre, nous avons également le regret de dire à ces personnes décédées qu´à leur nombre s´ajoutent les victimes des cyclônes Isaac et Sandy, et celles du choléra représentant le plus grand nombre, fléau apporté par la Minustha. Il est triste que l´on continue à multiplier ces cadavres dans des conditions vraiment inacceptables. Mais, nous  souhaitons à tous ces morts bonne arrivée dans leur demeure respective

Notre traumatisation comme survivants est profonde, nous avons des blessures partout en nous; sur notre corps, dans notre âme et dans notre esprit. Des séquelles de cette catastrophe nous guettent encore, nous portons à un endroit quelconque ses cicatrices. Plus de 400 000 de nos frères et soeurs s´empilent et vivotent dans l´insalubrité, la misère, le crasse, l´insécurité alimentaire dans des camps sous des tentes en plastique de très mauvais état. Nous demeurons très vulnérables sur tous les angles et la terre continue à trembler, et malheureusement, elle continuera à trembler. Deux récentes secousses ont été ressenties à quelques jours de la troisième commémoration de cet événement; une sur l´Île entière, entre Haiti et la République Dominicaine,  et l´autre sur la terre d´Haiti plus précisément à Diquini, dans la commune de Carrefour.  Ces diverses secousses nous effraient, mais la misère et la pauvreté nous contraignent à vivre comme n´ayant aucune mémoire, par conséquent, nos vulnérabilités s´accroitent. Nous avons une peur sans peur. Nous crions hypocritement à Dieu chaque fois que la terre tremble ou un autre phénomène naturel nous menace.  

Psychologiquement et mentalement, le séisme nous a rendus comme un peuple instable en devenant nomades sur notre propre territoire, étrangers dans notre pays, par le fait que nous sommes des oubliés, des rejetés, des survivants morts spirituellement. Notre survivance semble être un fardeau ou encore un emmerdement. La façon dont nous sommes traités laisse croire qu´il aurait été préférable pour nos dirigeants que nous périssions tous dans ce méga-tremblement de terre. Pardonner cet excès de langage! Mais nous exprimons nos indignations. Nous, survivants du séisme du 12 janvier connaissons une vie d´enfer et le pir c´est qu´aucun espoir n´est à notre horizon. On dit souvent qu´après la mort, la vie continue, mais quelle vie? Est-ce une vie dans laquelle les dirigeants agissent comme la mort en se bouchant les oreilles et nous laissent cuir dans notre jus? Est-ce une vie dans laquelle nos enfants meurent comme des insectes faute de nourriture et de soins médicaux? Est-ce une vie dans laquelle nous sommes totalement désarmés de notre dignité et de notre intimité? Est-ce une vie dans laquelle il n´y a même pas lieu d´avoir un espoir? C´est une vie de merde dont la mort est la délivrance par excellence! Ce n´est même pas une vie de chien, car dans les pays dirigés par des hommes responsables, personne ne peut se permettre de traiter un chien comme nos dirigeants nous traitent. C´est choquant, mais hélas! Il vaut mieux dire ces vérités qui nous rendent malades.

Il est vrai qu´en cette date mémorable de réflexion, de méditation et de recueillement, il faudrait éviter ces types de langage révoltant, mais avec quel courage pouvons-nous en passer outre quand même le minimum humain n´est pas acquis? Toutefois, 12 janvier 2010 nous a appris, en dépit de tout, une solidarité titanesque des haitiens, mais disparue subitement, un amour fraternel qui s´est mobilisé au milieu de nous pour enfin se noyer dans un océan de haine, une foi religieuse très fortement poussée qui s´est ensuite oubliée dans les vieilles pratiques quotidiennes, nous sommes redevenus comme auparavant. La vie n´est qu´un instant, auquel instant s´attache notre vivant au quotidien et cela nous a été également enseigné par le séisme du 12 janvier 2010. En une minute nous avons perdu 300 000 frères et soeurs, enrégistré 1,3 millions de sans abris et des centaines de milliers de personnes atteintes d´une infirmité, que faut-il de plus pour assimiler que nous sommes réellement une paille que le vent dissipe, un feu de paille de maïs qui s´enflamme puis s´étteint rapidement, un gaz qui se dégage? Certes, les catastrophes naturelles sont inévitables et d´autres comme les séismes sont imprévisibles, mais les conséquences qui en découlent ne le sont pas. Notre façon d´être aujourd´hui détermine notre être de demain.

Somme toute, avant toute construction physique, la construction mental, social, psychologique, sociologique et anthropologique de l´être haitien doit se faire premièrement. Soyons honnêtes, il est quasiment impossible qu´après  3 ans tous les  camps des réfugiés puissent être évacués voire démarer une soi-disante reconstruction. Cependant, en 3 ans beaucoup de choses auraient pu s´inicier s´il n´y avait pas de l´enrichissement illicite à tous les niveaux. Au lieu d´une construction de l´haitien en général qui devrait s´inscrire dans un plan national, chacun s´est construit soi-même en s´accumulant des fortunes au détriment des sinitrés. En agissant de la sorte, nos 300 000 morts connaissent une seconde mort, nous survivants, sommes des morts en vacance, de ce fait notre progéniture est menacée et cette menace suppose notre disparition totale de la carte géographique mondiale. Nous devons nous rendre responsables de nos propres actes. Dieu ne viendra pas interférer dans nos actions, Il ne se substituera pas non plus à nous. Si nous ne L´invitons pas, Il ne viendra pas, et même quand nous L´aurions invité, nous demeurons maîtres de notre destin. Tout cela doit nous porter à réfléchir sur le gravissime de nos actions. La leçon principale que nous avons besoin d´apprendre du 12 janvier c´est qu´en tout malheur il y a des choses positives à tirer.




Campinas, 12 janvier 2013

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